Gilbert Antoine de Saint-Maxent

Gilbert Antoine de Saint-Maxent, négociant et officier français, joua un rôle important dans le développement de la Louisiane Française.

Né en France en 1724 à Longwy en Lorraine, il était destiné à devenir, de par son sens aigu des affaires et de son courage militaire, l’un des hommes les plus riches de la colonie de la Louisiane.

this-art-contest-will-be-hosted-on-our-assassins-creed-tumblr-page-assassinscreed-tumblr-com-please-make-sure-to-follow-our-page-if-you-havent-yet-copieEn 1744, à l’âge de 20 ans, , il s’engagea dans l’armée française, s’embarqua pour la Louisiane, et s’installa à La Nouvelle-Orléans. Gilbert Antoine de Saint-Maxent se distingua tout d’abord en tant que soldat en combattant les indiens. À cette période le commerce de la fourrure entravé par les tribus Chicasaw, amena la France à construire une ligne de forts le long de la rivière Ohio. L’Angleterre par le biais de l’Ohio Company en Virginie commençait à empiéter sur le territoire exploré et revendiqué par la France, une partie de l’attraction des deux pays étant la traite des fourrures.

cinq ans plus tard après son arrivée dans la colonie, soit en 1749, il épousa une jeune veuve créole, Elizabeth La Roche. La jeune épousée amenait une dot de 5000 pesos espagnols (un peso de l’époque valait entre 15 à 20 $ en 2003). L’inventaire de l’époque signalait entre autres une table de billard en acajou d’une valeur de 200 pesos et une table en marqueterie pour les échecs et les dames d’une valeur de 60 pesos.

illustration-du-livre-deliza-moore-chinn-mchatton-ripley-social-life-in-old-new-orleans-1832-1912f154275132Le jeune marié utilisa la dot de son épouse pour acheter un bâtiment sur la rue Conti et entra ainsi dans le négoce de la colonie comme marchand d’approvisionnement pour la traite de la fourrure. La traite des fourrures était l’échange de biens de nécessité contre des fourrures, en particulier entre les colons et les autochtones. De Saint-Maxent achetait les peaux de castor, de loutre, d’ours, de bison, de raton laveur, de chat sauvage, de renard, de lynx et de cerfs contre des fournitures et des marchandises, tels que le riz, le sucre, la mélasse, le tafia, le tabac, ou des produits manufacturés en provenance d’Europe et des babioles. Le jeune négociant prospéra de suite dans cette entreprise.

Louis Billouart de Kerlerec

Louis Billouart de Kerlerec

En 1753, lorsque la guerre de Sept Ans éclata entre la France et l’Angleterre, elle déclencha les guerres indiennes, les deux pays se servant des autochtones comme combattants. Le gouverneur de la Louisiane, Louis Billouart de Kerlerec, se sentant acculé par les navires de guerre britanniques dans le Golfe et l’hostilité des Chickasaw sur la terre, organisa une milice pour protéger la colonie. Il promut Gilbert Antoine de Saint-Maxent comme colonel et commandant du régiment de la Louisiane. Ce dernier se distingua dans les combats de défense contre les incursions de la Louisiane des Britanniques et des Chicasaws. Après la guerre, le gouverneur, voulant prodiguer une récompense à de Saint-Maxent pour son service militaire et son soutien politique, il lui octroya le droit exclusif de commercer avec les tribus à l’ouest du fleuve Mississippi et de son affluent le Missouri. De Saint-Maxent, désirant faire fructifier son commerce, engagea son compatriote français Pierre Laclède.

Après la guerre, le gouverneur, afin de le récompenser pour son service militaire et son soutien politique, octroya à de Saint-Maxent le droit exclusif de commercer avec les tribus à l’ouest du fleuve Mississippi et de son affluent la rivière Missouri. Afin de réaliser son projet et faire fructifier son commerce, il engagea son compatriote français Pierre Laclède.

this-art-contest-will-be-hosted-on-our-assassins-creed-tumblr-page-assassinscreed-tumblr-com-please-make-sure-to-follow-our-page-if-you-havent-yet-copieLe Béarnais, dit Pierre Laclède Liguest, avait appareillé de Bordeaux en 1753 pour la Louisiane. Quand la guerre de Sept Ans avait éclaté, ayant offert ses services au gouverneur, il était devenu un officier personnel de Saint-Maxent. Ce dernier l’envoya établir le commerce Ouest du fleuve Mississippi. Il revint à la mi-juillet de 1755 à La Nouvelle-Orléans, annoncé sa réussite.

En 1761, ayant intégré les 40 plus grandes fortunes de la colonie, de Saint-Maxent forma un comité de marchands afin d’aller protester à Paris contre les accusations de l’Intendant économe Rochemore, envers le gouverneur Louis Billouart de Kerlerec. Ce dernier avait fait rappeler à Paris l’ordonnateur de la Louisiane française, Vincent-Gaspard de Rochemore, l’officier de la marine Antoine Philippe de Marigny de Mandeville et le trésorier royal Jean-Baptiste d’Estrehan Honoré de Beaupré avec qui il était en conflit et qui étaient défavorables à ses visions pour la colonie. Mais ces derniers une fois à Versailles, utilisant leurs relations, dénoncèrent ses méthodes dirigistes et l’accusèrent de corruption. Finalement, le roi le fit rappelé à Paris et jeté en prison en 1763.

Le gouverneur n’était pas le seul à être en difficulté, Pierre Laclède perdit cette année-là sa petite plantation en raison de difficultés pendant la guerre avec l’Angleterre. Finalement, Gilbert Antoine de Saint-Maxent l’aida et lui donna 25 % d’intérêt dans sa maison de négoce de fourrure afin d’agir à titre d’agent de commerce de la fourrure dans l’Illinois. Ce fut ainsi que de Saint-Maxent fonda une nouvelle maison de négoce, la Compagnie Saint-Maxent & Laclède.

traite fourureEn 1763, les hostilités avec l’Angleterre finies, de Saint-Maxent était devenu une figure militaire de notoriété et le premier marchand de La Nouvelle-Orléans. Profitant de cet élan, il emprunta de l’argent pour le commerce indien, acheta des marchandises de France et en organisa le paiement en peaux de daims. Le commerce de la fourrure du Pays de l’Illinois lui permit d’accroitre sa fortune pendant un certain temps, mais le Traité de Paris avait amené les Britanniques dans l’arrière-pays de la Colonie et au cours des années, à l’ouest, le long de l’Ohio. À cette même période, de Saint-Maxent décida d’établir un poste de traite avec un entrepôt central pour son commerce de pelleteries, il voulait séparer ses entreprises des commandants de poste qui avaient tendance à utiliser son commerce à leur propre avantage. Pour cela, il envoya Pierre Laclède établir un comptoir au confluent du Mississippi et du Missouri. Quittant La Nouvelle-Orléans en août 1763, Pierre Laclède et Auguste Chouteau, fils de sa compagne, remontèrent le Mississippi et après trois mois de durs labeurs atteignirent le Fort de Chartres à l’embouchure de la rivière Ohio dans lequel Monsieur de Noyen de Villiers était le commandant. Les environs du confluent étant trop marécageux pour y construire un poste afin de stocker les fourrures en attendant de les amener à La Nouvelle-Orléans, ils choisirent un endroit plus approprié, situé 30 kilomètres en aval. Pierre Laclède commença à faire construire des abris sur le poste baptisé Saint-Louis en hommage au roi Louis IX. Les travaux de construction commencèrent en 1764, dirigés par Auguste Chouteau. Après trois ans, le poste devint le plus grand comptoir dans la vallée du Mississippi au nord de La Nouvelle-Orléans. Avec le Traité de Paris donnant l’est des terres de la rivière à de nombreux Britanniques le long de l’Ohio, les colons français fuirent la domination anglaise. Emportant avec eux jusqu’aux portes et fenêtres de leurs maisons ils vinrent s’installer dans ce nouveau poste qui se développa pour devenir la ville de Saint-Louis. Cette entreprise se révéla très rentable et de fait, de Saint-Maxent vit sa fortune augmenter. En fait, elle augmenta suffisamment pour qu’il soit en mesure d’obtenir une subvention de huit mille mètres carrés de terrain sur un site appelé Chef Menteur, à l’est de La Nouvelle-Orléans.

carlos-iiiCe fut à cette période que la colonie apprit qu’un traité avait été signé le 3 novembre 1762 à Fontainebleau. le roi de France, Louis XV, avait cédé la Louisiane à son cousin, le roi d’Espagne, Carlos III, pour empêcher les Anglais de la prendre à la fin de la guerre de Sept Ans. Mais le gouverneur Jean Jacques Blaise D’Abbadie n’avait reçu aucune confirmation officielle de la cession jusqu’à cette année. Un comité se forma et fut envoyé à Paris pour protester et témoigner de la fidélité de la colonie à la France. Les prières coloniales ne dissuadèrent pas Louis XV, pas même celles de Jean-Baptiste Le Moyne de Bienville. Malgré le refus de la population franco-louisianaise et de leurs compatriotes métis (Amérindiens/Français) de supporter les conséquences du Traité qui les jetaient sous la férule de l’Espagne, ce fut la fin de la domination française. De Saint-Maxent, réaliste sur la situation, décida de ne pas participer à la rébellion ouverte.

Antonio De Ulloa

Antonio De Ulloa

En 1766, avec un seul navire, une frégate, « El Volonte », trois officiers civils et une force de seulement 90 soldats le nouveau gouverneur espagnol Antonio De Ulloa arriva à l’embouchure du fleuve à La Balise. Gilbert Antoine de Saint-Maxent, en homme pragmatique, fut l’un des premiers Français à faire allégeance au nouveau gouverneur espagnol, Antonio De Ulloa. Lui faisant bonne figure, Il visita ouvertement le gouverneur tandis que d’autres se moquaient de lui. Il lui demanda même de devenir le parrain de la quatrième de ses filles, Marie Antoinette Joseph, qui venait de naître.

Antonio De Ulloa mit en place une politique de traite des fourrures stricte en ce qui concernait les Indiens. Il maintint l’expérience des Commandants français aux postes frontaliers qui avec des cadeaux faits aux Indiens maintenaient la paix. Il autorisa donc les négociants à garder les tribus sous contrôle. Le centre de traite le plus important devint le poste de Saint-Louis pour le négoce avec les Osages, les Kansas, les Otoes, les Pawnees, les Sacs, les Foxe, les Iowas, les Missouri, les Sioux et les Ottawas.

En 1768, tout se gâta. Antonio De Ulloa se plaignit au roi d’Espagne, les affaires financières de la colonie étaient désespérantes. Pour les corriger, il annonça son intention de sévir contre les opérations de contrebande en Louisiane, par la fermeture de l’embouchure du fleuve Mississippi. En même temps, il déclara que la Louisiane ne ferait plus de commerce et d’échanges avec la France ou l’une de ses colonies, en conformité avec la politique coloniale espagnole. Quant à de Saint-Maxent qui pensait avoir fait un bon investissement, il obtint l’entretien de la frégate royale.

Pour les Louisianais, c’en fut trop. En janvier 1769, ils se rebellèrent contre l’occupant espagnol. À la veille de la révolution pour renverser Ulloa, Charles Philippe Aubry dépêcha Gilbert-Antoine de Saint-Maxent sur la côte allemande avec des fonds pour calmer les Allemands. En fait, 400 d’entre eux marchaient déjà sur La Nouvelle-Orléans sous le commandement de Joseph Antoine de Villere, vers la place d’armes à la rencontre des planteurs des alentours de la ville. Pris de court, de son côté, de Saint-Maxent essaya de contrecarrer les efforts déployés par les révoltés pour enrôler les Indiens de la colonie dans la lutte contre les tentatives Espagnoles pour reconquérir La Nouvelle-Orléans. Mais Nicolas Chauvin De Lafreniere et Pierre Marquis envoyés par Joseph Antoine de Villeré et Nicolas-Pierre Verret partirent l’arrêter à la plantation de Cantrelle, le commandant des Acadiens. Les insurgés prirent le dessus et le capturèrent et le placèrent en résidence surveillée dans une de ses propriétés. Les insurgés par l’intermédiaire De Lafreniere demandèrent le départ du gouverneur Ulloa de la colonie. Face aux révoltés, le gouverneur espagnol, ne présentant qu’une force d’appoint de moins d’une centaine de soldats et quelques fidèles Louisianais, finit par s’exécuter. Charles-Philippe Aubry escorta le gouverneur et sa femme enceinte à bord de la frégate « El Volante » ancré au milieu du fleuve. Le soulèvement concerna essentiellement le sud de la Louisiane française et plus particulièrement la région de La Nouvelle-Orléans.

Alejandro O'Reilly

Alejandro O’Reilly

L’Espagne n’avait pas dit son dernier mot, elle envoya en retour un nouveau gouverneur, Alejandro O’Reilly avec deux mille soldats espagnols. Le 19 juillet, de Saint-Maxent, libéré depuis le départ de l’ancien gouverneur espagnol, organisa une réunion cordiale pour l’accueil du nouveau gouverneur. La transition se passa pacifiquement. O’Reilly fut reconnaissant envers les Louisianais pour le sang qui n’avait pas coulé l’année précédente lors de la rébellion de La Nouvelle-Orléans. Néanmoins, le nouveau gouverneur reprit les choses en main. Le 18 août, le drapeau français fut officiellement remplacé par celui de l’Espagne et lors d’un repas de réconciliation, O’Reilly piégea les anciens chefs conjurés. Ces derniers furent aussitôt arrêtés. Parmi eux, messieurs De Lafreniere, Caresse, Marquis, Joseph Milhet et Noyan furent condamnés à mort le 25 octobre et fusillés le lendemain au grand désarroi des Orléanais ; un autre, Foucault, haut fonctionnaire, fut renvoyé en France où il fut emprisonné pendant deux ans ; enfin cinq autres émeutiers furent emprisonnés à Cuba pendant deux ans également et leurs biens furent saisis. les louisianais en deuil,  implorèrent vainement le nouveau gouverneur pour un sursis qui eut permis de requérir la clémence royale, mais il fut intraitable. la seule grâce qu’il accorda fut la substitution de la fusillade à la potence.

O’Reilly abolit le Conseil Supérieur franco-louisianais et instaura un Cabildo pour diriger la Louisiane sous juridiction espagnole.

Ce fut à cette époque que le partenariat entre de Saint-Maxent et Pierre Laclède fut dissous. Pour 80.000 livres en quatre versements égaux, Laclède acheta le poste de Saint-Louis. Il obtint tous les bâtiments, les marchandises et la terre, le tout à payer en juin 1771. La population de Saint-Louis était alors de 891 individus, sans compter les esclaves, mais les affaires de Laclède baissèrent et il ne fut jamais en mesure de payer de Saint-Maxent.

11105De Saint-Maxent, qui avait soutenu la cause espagnole dès le début, n’allait avoir aucune raison de regretter cette décision. O’Reilly, dans le but de rétablir l’ordre dans la colonie, établit une organisation militaire fondée sur une forte milice coloniale plutôt que sur des troupes espagnoles régulières. Il se tourna à nouveau vers de Saint-Maxent qu’il nomma capitaine de la milice et commissaire des Affaires indiennes avec des instructions pour maintenir les tribus amies. O’Reilly ordonna également que tous les biens distribués aux Indiens partout dans la colonie dussent être achetés et livrés par la maison de négoce de Saint-Maxent et Ranson nouvellement créée. La maison de négoce de Saint-Maxent et Ranson soumit à Martin Navarro, le trésorier de la ville, un rapport détaillé de la marchandise livrée aux Indiens, y compris le pain, les couvertures, deux fusils avec poudre, grenailles et balles, des miroirs, des houes, des haches, des couteaux, du cinabre, de la sauce piquante, de la chaîne, des peignes, des chemises, des bibelots, des casseroles en cuivre, du sel, seize citernes, une tente, des aiguilles, du fil et des ciseaux. La liste accordée, le contenu de celle-ci fut donné à chaque nation indienne dans la colonie soit plus de quarante. Le rapport comprenait le transport, l’emballage et l’assurance. L’entreprise, qui rivalisait avec celle de Pierre Laclède contribua à la diminution de sa fortune à Saint-Louis. Dans le même temps, les plaintes s’élevèrent sur le monopole de Saint-Maxent, aussi fut-il annulé, mais le changement mit plusieurs années avant de rentrer en vigueur, aussi sa fortune s’accrut elle tout de même.

De plus après l’arrivée d’O’Reilly, de Saint-Maxent fut invité à négocier les conditions de la cession, en tant que représentant officiel de l’Espagne. Une lettre postérieure, de Carlos III à Bernardo Galvez, écrit en 1781, fait référence à la nomination de Saint-Maxent qui a cette période s’était distingué par sa fidélité à la couronne espagnole en risquant de sacrifier sa vie et sa richesse pour le bien-être de la couronne.

Les 15 années qui suivirent furent les plus brillantes de sa vie. En 1770, Elizabeth La Roche et Gilbert de Saint-Maxent avaient eu huit enfants prometteurs et il était l’homme le plus riche de la colonie.

img_2723Sur une de ses quatre plantations qu’il possédait, de Saint-Maxent déménagea sa famille dans une nouvelle maison en dehors des remparts. La plantation située immédiatement en aval de La Nouvelle-Orléans, est aujourd’hui connue sous le nom de Faubourg Marigny, car il la revendra 7 ans plus tard à Don Lorenzo Sigur, un capitaine de la milice qui lui-même la revendra à Pierre Philippe de Marigny de Mandeville. Riveraine du fleuve, elle était bâtie sur un arpent légèrement inférieur à 200 pieds de large. D’une superficie de 28 pieds de long et 16 pieds de large, elle était construite en planches de cyprès. Il s’agissait d’une imposante maison de maître de 2 étages avec des galeries supérieures sur les quatre côtés, sept colonnes de chaque côté, arrondi vers le bas et carré en haut, deux lucarnes, deux cheminées, un paratonnerre, un grand toit en pente, deux volées d’escaliers.

la-signature-du-contrat-de-mariage-par-george-sheridan-knowlesCette même année, de Saint-Maxent maria sa fille ainée, Marie Elizabeth, au nouveau gouverneur espagnol de la Louisiane Luis De Unzaga y Amézaga. Deux ans plus tard en 1772, il maria sa deuxième fille Marie Félicité à Jean Baptiste Honoré Destrehan, appelé de Beaupré, fils du trésorier royal qui s’était opposé au gouverneur de la Louisiane, Louis Billouart de Kerlerec, quelques années avant. Le jeune mari décéda trois ans plus tard laissant la jeune veuve avec un nourrisson, une petite fille. Deux ans plus tard, en 1777, de Saint-Maxent remaria sa fille à Bernardo de Galvez arrivé en tant que colonel et gouverneur par intérim de la province. Marie Elizabeth de Saint-Maxent, quant à elle accompagna son époux nommé capitaine général du Venezuela.

Cette année là, après avoir vendu sa demeure, il déménagea une nouvelle fois. De Saint-Maxent construisit sur son terrain de Chef Menteur, sur la crête de Gentilly en bordure du lac Pontchartrain, à l’est de La Nouvelle-Orléans une maison grandiose pourvue d’une table de billard en acajou, de deux tables incrustées d’échecs, d’un clavecin, des miroirs encadrés en or, deux globes, l’un terrestre, l’autre céleste, d’une horloge qui sonne les heures avec un chant d’oiseau, d’une bibliothèque de 4700 ouvrages. De plus, sa plantation de 34.500 hectares disposait d’une scierie, de cinquante cases pour ses esclaves, de 12 chevaux, 4 mules, 80 porcs et une distillerie de rhum. Il avait aussi une autre plantation de quatorze arpents de terres de l’autre côté du bayou Saint-Jean, cours d’eau qui coule dans les faubourgs de La Nouvelle-Orléans pour aller se jeter dans le lac Pontchartrain. Il avait plus de 200 esclaves, sur ses plantations et ses entreprises, en provenance de Mira, du Sénégal, de la Guinée et du mandingue. D’autres étaient crillos, nés dans la colonie. À ses plantations se rajoutait le commerce de la fourrure ainsi que plusieurs autres entreprises, dont une entreprise de construction, le Poste de Saint-Louis ainsi que des navires et des entrepôts remplis de marchandises.

De son côté, Pierre Laclède se retrouva bientôt couvert de dettes et en mauvaise santé. En 1777, il dut se rendre à La Nouvelle-Orléans pour tenter de redresser la situation. C’est au cours du voyage de retour à Saint-Louis qu’il mourut, le 27 mai 1778, sur un bateau ancré à environ huit kilomètres en aval du poste de l’Arkansas sur le Mississippi.

bernardo-de-galvez-1746-1786En 1778, pas encore gouverneur, le jeune Bernardo Galvez fut chargé de chasser les Anglais de la Louisiane et d’installer à leur place des colons espagnols. Il se fit assister comme ses prédécesseurs par Gilbert de Saint-Maxent et son fils aîné Gilbert Antonio.

En 1779, dans l’espoir d’établir une armée forte contre les Britanniques en Floride occidentale, qui contrôlait la proximité de Bâton-Rouge à l’époque, il fit venir des îliens des Canaries, nommés les Isleños. Ils furent amenés aux frais du roi, leurs maisons et leurs églises furent construites avec l’aide royale à Galveztown dans la Paroisse de l’Ascension et à Valenzuela sur le Bayou Lafourche. De Saint-Maxent fut affecté à la livraison des fournitures de deux colonies tandis que le jeune Gilbert Antonio de Saint-Maxent en devint le commandant militaire.

En aout de cette année-là, durant la Guerre d’indépendance des États-Unis, après avoir donné l’ordre de commencer les hostilités contre les colonies britanniques en Floride occidentale, Bernardo de Galvez demanda de l’aide à l’ancien colonel. Âgé de 55 ans Gilbert de Saint-Maxent passa 42 jours à Fort Bute afin d’espionner la garnison anglaise. Il revint avec les informations nécessaires et reçut le commandement de la milice pour lutter contre les forces britanniques. Commandant une milice de 650 hommes, mais pas l’armée régulière espagnole, il participa à l’attaque des trois forts, sur la frontière Ouest de la Colombie-Ouest de la Floride, les Forts Bute sur la Manchac, Bâton-Rouge et Natchez.

cuadro_por_espan%cc%83a_y_por_el_rey_galvez_en_americaLa prise de Fort Bute le 7 septembre 1779 marqua le début de l’intervention de l’Espagne dans la Guerre d’indépendance des États-Unis, aux côtés de la France et des révolutionnaires américains. Menant des troupes de l’armée régulière espagnole, une milice acadienne et des natifs de Louisiane, le gouverneur Bernardo de Gálvez envahit et captura le poste-frontière britannique de Manchac. Puis en janvier 1780, Galvez et de Saint-Maxent quittèrent La Nouvelle-Orléans pour La Mobile avec 500 réguliers et 250 miliciens de Saint-Maxent. Cependant, leurs navires subirent un violent orage et échouèrent dans la baie de Mobile. De Saint-Maxent risqua sa vie pour sauver ses hommes et les faire évacués. Il fallut deux jours et deux nuits. Ensuite, le siège put commencer. La Mobile se rendit et Pensacola suivit. Pour cela, de Saint-Maxent avança 76.000 pesos au trésor royal pour payer les troupes et les frais de couverture. Pensacola tombée, l’ouest de la Floride était une nouvelle fois sur le territoire espagnol. De Saint-Maxent se vit décerner les titres du commandant de la milice de la Louisiane, de lieutenant-gouverneur de Providence en Louisiane et de la Floride Occidentale, de capitaine général du nouveau Bureau des Affaires indiennes de Louisiane et de la Floride occidentale ainsi que de nombreux autres avantages en compensation de son investissement.

Suite à tout cela, Il déclara que la victoire avait entravé le commerce de la Louisiane, qu’il avait été maintenu en vie par le commerce avec les Britanniques. Il était vrai que le commerce avait pratiquement cessé pendant la guerre et que les fournitures étaient épuisées en Louisiane. Les nobles en Espagne étaient moins agressifs ou industrieux que d’autres Européens à cette époque, en particulier en ce qui concernait la colonie de la Louisiane. Aussi, en octobre 1781, Cornwallis battu à Yorktown, de Saint-Maxent s’était mis en route pour la Cour de Carlos III pour assurer la prospérité en Louisiane et pour lui-même par le commerce de la fourrure offensif avec les Amérindiens.

jennie_brownscombe_-_washington_greeting_lafayette_at_mount_vernon-2Avant son départ, en mai, Gilbert Antoine de Saint-Maxent maria sa troisième fille Maria Victoria à Juan Antonio Riaño y Barcena, un officier espagnol. Puis ce fut le tour de sa quatrième fille, Antoinette Marie Anne Joseph de Notre Dame de Mont-Carmel qui se maria à Manuel de Flon, Comte de Cadena. Ces deux nouveaux gendres servirent dans la Révolution américaine et accompagnèrent Bernardo de Galvez à Cuba et au Mexique lorsqu’il devint vice roi de Nouvelle-Espagne.

À peine arrivé en Espagne, il transigea avec les ministres et les diplomates et négocia avec le roi. De Saint-Maxent présenta son cas à la couronne : « La marchandise dont il a besoin souffre d’un droit de 15 % constitué de taxes municipales, de frais de transport, de commissions pour la réception, le transfert et le stockage des marchandises, inconnues des Anglais. Les exportations doivent encore aller vers les ports espagnols sur des navires espagnols, mais l’Espagne ne dispose pas suffisamment d’usines pour gérer toutes les peaux que lui et la Louisiane fournissaient. » Suite à ses réclamations, de Saint-Maxent obtint des concessions de la part de Carlos III, notamment l’autorisation d’importer des esclaves avec paiement des droits, 10 années d’expéditions commerciales à l’aide de navires espagnols vers les ports français et autres puissances amies et un abattement de l’impôt de 9 %, avec une évaluation modérée des marchandises importées et exportées. Exemption des droits sur les fûts et tonneaux exportés vers l’Espagne. Il demanda également la possibilité d’exporter de La Nouvelle-Orléans et de Pensacola vers les colonies américaines toutes les marchandises espagnoles qui n’avaient aucun marché en Louisiane, une période de deux ans pour l’achat libre de navires étrangers. Dans le cadre de la négociation, il accepta de ne pas exporter des espèces (lingots d’or).

scene-de-pont-montrant-poulailler-barreur-et-capitaine-vers-177530 Novembre 1781, 380.000 pesos de valeur marchande furent envoyés à la Louisiane et à la Floride occidentale, dont 200.000 dans le but de maintenir l’harmonie avec les indigènes. L’Espagne n’ayant pas ces produits, Saint-Maxent fut autorisé à les négocier en France et ailleurs. L’accord royal lui ayant octroyé toutes ses demandes, au début de l’année 1782, Saint-Maxent revint à la Louisiane.

Tout aurait pu aller pour le mieux pour Gilbert de Saint-Maxent qui, à 58 ans, avait son avenir dans l’or royal d’Espagne, seulement, sur la route de retour, ses deux navires, La Margarita et la Felicidad, ainsi que leur équipage furent capturés par les Britanniques et envoyés à Kingston, en Jamaïque, où il allait être tenu en résidence surveillée et ses hommes en prison. Ses navires et leurs cargaisons furent réquisitionnés et vendus comme récompense de guerre. De Saint-Maxent fut autorisé à subvenir à sa propre subsistance, mais il fut confiné à Kingston. Il réussit à obtenir un prêt d’un Anglais pour pourvoir aux besoins de ses officiers espagnols pendant cette épreuve. Galvez de son côté finit par obtenir la libération de tous les prisonniers espagnols.

esteban-rodriguez-miro-y-sabaterComble de malchance, en Louisiane, son gendre Bernardo de Gálvez fut amené à partir avec son épouse Marie Félicité de Saint-Maxent en Espagne pour aller combattre aux Pays-Bas, laissant Esteban Rodríguez Miró y Sabater comme gouverneur intérimaire de la Louisiane.

Pendant cette période, le contrat de Saint-Maxent avec Carlos III était arrivé à terme échu. Le congrès, qu’il avait organisé avec les nations indiennes, était désormais reporté au printemps 1784 et les marchandises qu’il avait si difficilement obtenues étaient aux mains des Britanniques. Il se mit en devoir d’obtenir d’autres prêts pour racheter ses navires et une partie de la cargaison. À l’automne, le bienfaiteur anglais de Saint-Maxent fut arrêté à La Havane. Accusé de contrebande d’espèce, il impliqua de Saint-Maxent, aussi une ordonnance royale espagnole fut délivrée pour son arrestation et un embargo fut mis sur ses actifs et ses propriétés.

Pendant ce temps son fils ainé Gilbert Antoine se maria Marie Charlotte Françoise Esnoul de Livaudais, fille d’une riche famille de la colonie.

Depuis l’échec de Saint-Maxent, le Gouverneur Estéban Rodriguez Miró y Sabater accorda la permission pour les marchands anglais de rester en Floride pour apaiser les Indiens. James Mather, responsables de la société commerciale « Mather et Strother », spécialisé dans l’import-export à La Nouvelle-Orléans et travaillant avec les autorités espagnoles dans le commerce des biens en partance vers l’Europe, au moyen de la flotte de navires mouillant sur le fleuve Mississippi, fournit les Indiens avec des marchandises de Londres et garda les Américains hors de l’affaire.

Lors des procédures judiciaires au printemps de 1784, à La Nouvelle-Orléans, dont le Tribunal était composé de Don Narciso de Alba, de Don Santiago Meder et de Don Juan Bautiste Poeyfarrè, de Saint-Maxent répondit aux charges en affirmant qu’il avait payé l’Anglais en envoyant des lingots d’or et pesos d’argent à la Jamaïque.

 Un inventaire fut fait de ses biens et propriétés, et démontra que sa richesse était de loin la plus grande dans la colonie. Don Andres Almonester en fut nommé gardien suite à l’évaluation faite par Don Joseph Adrian et Don Andres Waukarmy. De Saint-Maxent fut relevé de ses fonctions en tant que capitaine général des Affaires indiennes et du lieutenant-gouverneur.

Les accusations criminelles furent abandonnées un an plus tard, mais ses biens furent laissés sous embargo en attendant le règlement de ses affaires. Parmi les autres dettes qu’il devait, il y avait 66.000 pesos à Monsieur Lafitte de Bordeaux. La fortune de Saint-Maxent se dégrada rapidement.

don-andres-almonaster-y-rojasDurant le grand incendie de 1788, S’ensuivit la destruction de ses entrepôts sur la rue de Conti à La Nouvelle-Orléans. Malgré ses difficultés, de Saint-Maxent aida toutefois Don Andrés Almonaster y Rojas à reconstruire la ville et lui proposa son neveu l’architecte Gilbert Guillemard.

À la fin de l’année de 1789, un autre ordre royal le soulagea de ses fonctions et l’assigna à l’état-major général de Madrid, mais le règlement de ses affaires financières empêcha le déplacement malgré l’aide de sa fille Marie Félicité, devenue veuve de Bernardo Galvez.

En 1791, il voyagea à La Havane pour régler ses dernières de ses dettes. A son retour, gouverneur Miró y Sabater l’arrêta, mais l’arrestation de toute personne de son rang devant être faite par le capitaine général de Cuba, il fut relâché.

Estéban Rodriguez Miró y Sabater laissa son poste à la fin de 1791 et retourna en Espagne pour servir au Ministère de la Guerre. Le nouveau gouverneur Francisco Luis Hector de Carondelet, un noble belge au service de l’Espagne, devint un ami de Saint-Maxent. Il le rappela au service de l’armée pour l’aider à construire le fort San Felipe.

De Saint-Maxent l’aida à reconstruire les fortifications de fort San Felipe en aval de La Nouvelle-Orléans. Soixante de ses esclaves construisirent en brique et mortier le fort dessiné par Guillemard qui fut achevé au printemps 1794.

Cette même année, Carondelet le promut au grade de général de brigade, mais de Saint-Maxent tomba malade, et s’installa dans la maison de son vieil ami Lorenzo Sigur en dehors de la ville. Il y mourut le 8 aout 1794 ayant eu juste le temps d’écrire ses dernières volontés.

historic-buildings-of-the-french-quarter-14Gilbert Antoine de Saint-Maxent se révéla aussi efficient dans le négoce, qu’en tant que soldat ou qu’en tant que père. Ses affaires eurent un certain nombre de hauts et de bas au fil de ses relations plus ou moins chanceuses avec les différents gouverneurs, mais il était encore une puissance dans la colonie au moment de sa mort, le 9 août 1794, à l’âge de 70 ans. Aussi remarquables que fussent sa situation financière et sa carrière militaire, il ne faut pas oublier la remarquable carrière de ses filles.

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